Lise Biron artiste

Lise Biron  artiste

Les salopes

Ce texte regroupe des histoires de femmes qui ont été lésées, trahies par leurs collègues, leurs amies et même par leur sœur.

Qu’est-ce qu’une salope?

Selon monsieur Larousse, une salope, c’est une femme dévergondée, de mauvaise vie, une garce.

Moi, j’exprime ça en ces termes : c’est ce type de femmes qui fait qu’on a parfois honte de faire partie de la gent féminine.

Une salope, on en a toutes rencontrée une très tôt dans notre vie et comme si cela n’était pas assez, il en apparaît toujours une nouvelle… comme une tache qui ne part pas. Il y a Céline, Clairette, Caroline, Madeleine…

D’abord, il y a eu Marie, fille de Mario, qui se fait maintenant appeler Maria. Chions donc! C’était la 2e voisine  de Blondinette alors âgée de 5 ans quand la famille a emménagé. Pas très jolie, blond terne, racines des cheveux  trop basses sur le front, dents de lapin, face de rat; ça ne ment pas.

Je ne savais pas encore que la morphologie du visage pouvait en dire long sur les personnages; toutes les «faces de rat» que j’ai rencontrées étaient des salopes. Mais passons. Marie et Blondinette allaient à la même école, mais n’étaient pas en compétition, la première n'était que dans la moyenne. Cependant, dès le primaire, elle a joué un rôle très important dans les relations humaines. Prétendant être la meilleure amie de la timide Blondinette, elle s’offrait à faire les commissions auprès des flirts à l’insu des regards indiscrets.

C’est ainsi que Sylvain qui avait un faible pour Blondinette remit à Marie une lettre pour sa douce flamme. Et c’est à partir de ce moment que Marie put sélectionner les soupirants de Blondinette. C’est simple, elle répondait à la place de son amie et éconduisait tout jeune homme intéressé et, intéressant pour elle. Ainsi Blondinette eut la réputation d’attirer les garçons seulement pour flatter sa vanité et de les décevoir dès qu’ils lui portaient attention ne répondant pas à leurs attentes. Donc… agace à éviter.

Le manège a été découvert 40 ans plus tard quand Blondinette a organisé des retrouvailles des élèves du primaire. Elle parle de son projet à Marie, qui a été abandonnée pour une «poupoune» par son conjoint et qui en est très frustrée. Marie qui semble emballée par l'idée, dit aussitôt : «C’est moi qui téléphone à Sylvain, j'ai ses coordonnées». Pourquoi pas, elle s'offre à aider dans une tâche qui représente des jours de recherche.

Vient la rencontre des anciens et Sylvain n’y est pas. Sœur Berthe est tout étonnée, car elle communique avec lui à l’occasion et ignore la raison de son absence. Elle lui en parle et apprend qu’il n’a pas reçu la fameuse invitation. Il lui a alors confié qu’il avait eu 2 amours dans sa vie : Claire et Blondinette; la 1re étant décédée dans la jeune vingtaine.

Quatre ans plus tard, de nouvelles retrouvailles sont organisées et Blondinette ne prend pas de chance cette fois-ci, elle fait elle-même ses invitations.

Sylvain est maintenant légiste et dans ses temps libres, il écrit des polars. Blondinette achète sa 1re publication et fait dédicacer le volume par Sylvain à la rencontre des anciens: « À celle qui a occupé mes pensées et m'y a laissé seul, désemparé.»

De toutes façons, leurs vies ne se seraient pas partagées car  Sylvain était plutôt coureur de jupons; peut-être par dépit, on ne saura jamais.

Saura-t-on un jour tout le mal que Marie a fait? À combien de filles a-t-elle fait ces supercheries.

Il y a eu aussi le cas Jacquot, fils du nettoyeur. Ce n’était qu’amours de jeunesse, mais Blondinette était heureuse et son soupirant venait la trouver aussi souvent que possible. Elle qui n’avait jamais été aimée par son père jouissait d’une tendresse qui la comblait et la rassurait.

La jalousie de Marie était à son comble. Elle n’en pouvait plus. Un matin, elle va trouver Jacquot et lui dit : «Blondinette ne veut plus sortir avec toi». Et fait le même manège avec Blondinette. Cette dernière, très affectée, ne peut retenir son chagrin et s’épanche sur Marie.

Encore adolescents, les deux jeunes amoureux sont trop inexpérimentés pour se voir et s’expliquer; ils se replient sur eux-mêmes, se fuient et tentent de se consoler avec les amis.

Une quinzaine d’années plus tard, toujours par hasard, ils se retrouvent dans une soirée et, le vin aidant, peuvent échanger sur leurs amours déçues. Le chat est sorti du sac : la «face de rat» avait encore fait des ravages.

En dehors de la jalousie maladive, on ne comprend pas ce qui motive ce genre de fille. Cette Marie n’a pas réussi à sortir avec Sylvain ni Jacquot. Alors, pourquoi?

Elle a enfin déniché  quelqu’un  sans intérêt et elle joue à la petite madame, possiblement heureuse.

***

Parlons de Claire. Enseignante, collègue de travail d’Aurélie, et ayant un an d’ancienneté sur cette dernière, elle n’hésite devant rien pour lui montrer son rang et quand la chance lui sourit de l'humilier. Le rang est très important d’autant plus que Claire a un autre privilège : elle a déjà skié avec son directeur, Arsène. Nous sommes dans un petit village des Cantons de l’Est.

Claire est affligée d'un mal dégoûtant, le psoriasis mais pas ce qu'on en connaît généralement; on a tous vu des plaques rosées un peu desséchées sur les coudes des gens atteints de cette maladie. On dit qu'elle est exacerbée par le stress de toutes sortes. Mais Claire, elle, a une véritable carte géographique dans le dos qu'aucun maillot de bain conventionnel ne réussit à cacher. De plus, son abondante chevelure cache une chaîne de montagnes qui fait dire: «Pouach!» dans  tous les salons de coiffure qu'elle fréquente.

Elle a un avantage incontestable sur Aurélie; cette dernière bien que très jolie, souffre d'embonpoint et,  quand elle est blessée ou qu'elle retient des bêtises bien méritées envers sa collègue, elle mange des tablettes Aéro; elle est plus du genre timide et douce.

C'est ainsi que lors de rencontres d'enseignants, Claire n'hésite pas à chaque fois que l'occasion se présente de lancer à Aurélie: « Ah, moi, je ne me laisserai jamais grossir! Je ne parle pas pour toi, Aurélie». Qu'est-ce qu'on peut répondre devant tous les amis dans ces moments-là? «C'est vrai, j'ai des livres en trop, mais je suis gentille et je n'enfarge pas mes élèves et je ne leur donne pas de coups de pied pour montrer ma mauvaise humeur habituelle. Ils me croient et savent que je vais les conduire vers leur diplôme en soins infirmiers, ils me font confiance.

Un an d'ancienneté sur une collègue, c'est un pouvoir énorme. Par exemple, quand Mère Ste-Thérèse a pris sa retraite, il a fallu que Claire ou Aurélie prenne sa charge qui comprenait toutes les matières de base des élèves en soins infirmiers. La direction offrit à nos deux amies le poste qui fut carrément refusé sur le champs. Vous savez ce qui est arrivé? Claire exigé que ce soit Aurélie qui se paie cette tâche habituellement dévolue à l'expérience; c'est vrai qu'un an, ça ne pèse pas beaucoup dans la balance. Je crois avoir déjà dit que depuis le ski avec le directeur, c'est un peu elle qui dirige. Figurez-vous que la classe d'Aurélie s'est classée 1re au ministère, ce qui n'était jamais arrivé dans cette région; l'année suivante, Claire s'est emparée de la tâche, mais n'a pas joui de la même réussite.

J'ai oublié de dire que Claire détient un Bac en Nursing grâce à des travaux qu'elle a copié mot à mot dans différents livres de soins infirmiers. Il faut dire que ce diplôme est assez récent au début des années 1980. Possiblement que les correcteurs ne se souvenaient pas d'avoir déjà lu ces textes, d'autant plus qu'elle ne notait pas ses références. Évidemment, quand on copie...

 

À suivre...



21/06/2013
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